jeudi, mai 18, 2006

COMMENCER À VIVRE

En regardant vivre le monde, je me demande si c'est moi qui suis ralentie ou si ce sont les autres qui souffrent de surexcitation chronique. Qu'est-ce qu'on cherche? Où va-t-on? Il faut toujours être le meilleur, le plus riche. J'ai souvent envie de dire: "Du calme, arrêtons-nous et pensons un peu".
Quand je regarde les émissions de divertissement à la télévision, je pense qu'il y aurait peut-être moyen de s'amuser sans tant s'exciter.On ne peut plus jouer pour jouer, il y a de la compétition en tout: dans le jeu, le sport, à l'école, au travail. Il faut toujours se surpasser, dépasser les autres. Quand prendrons-nous le temps de souffler, de vivre, de nous parler, de nous aimer et de rire ensemble?
Les jeunes peuvent communiquer facilement tout autour du monde mais ne savent plus parler avec leurs proches. Que de parents s'ennuient depuis l'arrivée d'Internet! Les enfants sont si habitués d'avoir près d'eux quelqu'un pour animer leurs jeux que, dès qu'ils se retrouvent seuls, ils sont désemparés, ne savent plus quoi faire et s'ennuient. Ils n'apprendront pas à contempler, dans le sens de regarder attentivement les choses, la nature et les êtres. Je pense qu'on les prive d'une source de bonheur intense et durable. Voilà, c'est notre réalité, d'aujourd'hui. Sans blâmer personne, on peut tout de même se rendre compte qu'on se laisse guider par la cote d'écoute, la popularité, par l'argent, en somme, au lieu de penser à l'éducation qui serait d'apprendre aux enfants que l'équilibre est un gage d'une vie saine et heureuse. Autrefois, on nous proposait comme modèles seulement ceux qui étaient avancés en spiritualité. Aujourd'hui, tout nous pousse à imiter celui qui a le corps le mieux développé ou qui est le meilleur dans les sports, ou le plus intelligent, ou le plus habile, de sorte que celui qui fait du sport raisonnablement, travaille avec mesure, s'occupe de sa vie intérieure, prend le temps de vivre, celui qui mène une vie équilibrée en somme, est considéré comme un incompétent ou un retardé. Probablement que ça reviendra quand les tout-petits d'aujourd'hui seront devenus adultes et réaliseront qu'après un grand succès comme après une grande épreuve, on se retrouve toujours seul et que c'est en dedans de nous qu'il faut trouver la force et la lumière pour continuer. Alors seulement ils commenceront à vivre[1].

[1] un texte de Suzanne Légaré publié dans le courrier des lecteurs du journal Le Soleil, le 30 août 1999. Un coeur simple et beau, qui parle vrai et qui m'a touché également!

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